Tromper Martine by Stéphane Dompierre

Tromper Martine by Stéphane Dompierre

Auteur:Stéphane Dompierre [Dompierre, Stéphane]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Amour, Amitié, Érotisme, Humour
Éditeur: Les Éditions Québec Amérique
Publié: 2018-07-07T16:00:00+00:00


À midi quinze, une serveuse a déposé la deuxième tournée de gin tonics sur la table. La terrasse du Coppa Bar & BBQ se remplissait rapidement, de petits groupes se lançaient à l’assaut des meilleures tables autour de nous. Il faisait beau, la musique était bonne et nos fous rires idiots se mêlaient à l’agitation ambiante. Nous étions au début de l’été, les femmes étaient belles, et nous étions fermement résolus à profiter de la vie plutôt que de nous apitoyer sur notre sort. J’étais en mauvais état, accompagné de deux nouveaux célibataires désemparés, mais nous étions vivants. Nous allions survivre à ce triste épisode comme nous avions survécu à beaucoup d’autres.

Cet optimisme a duré une bonne heure.

Jusqu’à ce que Daniel, en parlant d’un tout autre sujet, nous rappelle que nous étions tous les trois des quadragénaires. Nous avons frissonné rien qu’à entendre le mot. Quadragénaire était un mot que nous utilisions lorsque nous étions adolescents pour désigner les moustachus sévères, les chauves bedonnants, les profs de philo aux airs de pédophiles ou n’importe quel adulte déprimant à qui nous ne voulions jamais ressembler.

Nous n’étions pas encore de vieux cons, mais bien des choses avaient changé depuis l’insouciance de notre adolescence. Chacun avait ses pilules à avaler le matin ou le soir : Alex avait son Singulair contre l’asthme, Daniel avait son Synthroid pour pallier sa glande thyroïde défectueuse, et moi je croquais régulièrement des comprimés contre les douleurs musculaires et contre les allergies saisonnières qui s’étiraient sur neuf mois de l’année. Nous fréquentions des ostéopathes et des massothérapeutes. La cuisine indienne nous donnait des brûlements d’estomac, nous devions nous méfier des reflux gastriques et des indigestions. Hier encore, il me semblait qu’une poutine à trois heures du matin suffisait pour contrer les effets de l’abus d’alcool alors que maintenant ça nous prenait deux jours et des Advil toutes les quatre heures pour nous relever d’une brosse. Il y a de mauvaises habitudes que nous tardions à changer : il fallait manger mieux, ménager notre foie, diminuer notre consommation de sucre, de sel et de gras ; la quarantaine était là pour nous rappeler que nous étions mortels et que notre corps demandait de l’entretien. Nous connaissions tous les trois quelqu’un, de près ou de loin, qui avait claqué sans avertissement après une crise cardiaque ou qui était mort d’un cancer foudroyant avant d’atteindre quarante-cinq ans. Les douleurs étranges qui autrefois s’estompaient après deux ou trois jours nous conduisaient désormais à la clinique la plus proche, à craindre le pire. Après des heures d’attente parmi les décrépits et les affreux, les parents en panique et les vieillards désœuvrés, nous nous faisions dire que non, ça va, c’est bon pour cette fois, vous n’en mourrez pas, prenez ces antibiotiques et dans deux semaines tout ira mieux. N’empêche, nous avions maintenant conscience que notre tour viendrait. Nous étions sans cesse tiraillés entre l’envie d’être prudents pour rester en forme et en santé le plus longtemps possible, et celle de vivre intensément, comme



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